Olivier Le Deuff, nommé à l’Institut Universitaire de France

Ancien professeur-documentaliste, docteur en sciences de l'information et de la communication, Olivier Le Deuff est professeur des universités depuis 2023 à l'IUT Bordeaux Montaigne, où il enseigne depuis 2011. Il a soutenu en 2017 une habilitation à diriger des recherches intitulée Documentation et humanités digitales, qui articule enjeux documentaires, littératies numériques et perspectives des humanités numériques.

Ses recherches ont pour thématiques principales l'épistémologie de l'information et du document, les humanités digitales, les littératies (informationnelle, numérique, algorithmique), et depuis quelques années les nouvelles pratiques d'enquête en sources ouvertes (OSINT). Auteur de plusieurs ouvrages, dont La formation aux cultures numériques (2009), Humanités digitales : historique et développements (2018) ou encore Hyperdocumentation (2021, ISTE/Wiley), il explore les mutations contemporaines de la documentation, du savoir, et de l'enquête, tant dans leurs dimensions conceptuelles que techniques.

Il est également à l'origine de réalisations logicielles, notamment des outils de visualisation de graphes de connaissances sous licence open source, comme les logiciels Otletosphère (lien externe) et Cosma. (lien externe) Ce dernier a été développé par Arthur Perret et Guillaume Brioudes. 

Articulant théorie et expérimentation, il a dirigé ou co-dirigé de nombreux projets de recherche financés (RICSA (lien externe) pour la fondation Maif, ANR HyperOtlet (lien externe), projet région AlgoJ (lien externe) avec Rayya Roumanos, projet Fondation Berkeley France Documentation and Knowledge Infrastructure: The Case of Robert Pagès avec Michael Buckland, etc.)

Il dirige actuellement le projet MatrioscIA dont les objectifs sont de comprendre les évolutions des méthodologies OSINT en lien avec le développement des technologies de l'IA, d'analyser leur utilisation actuelle et potentielle dans les enquêtes OSINT, notamment dans le journalisme d'investigation et d'évaluer les risques et les avantages éthiques, techniques et juridiques qui en résultent. Cette recherche s'articule avec le projet d'observatoire de l'OSINT soutenu par l'Université Bordeaux Montaigne.

Il a été professeur invité à l'Université de Montréal (EBSI) et chercheur invité au C2DH de l'Université du Luxembourg. Il préside depuis 2022 le conseil scientifique du GIS des URFIST (lien externe), et assure la co-direction de l'axe E3D du laboratoire MICA.

Son travail est traversé par une volonté constante d'articuler pédagogie, recherche et diffusion des savoirs, avec une attention particulière portée à l'éthique de l'information et à l'ouverture des connaissances. Sa nomination comme membre senior de l'IUFvient consacrer un parcours original et engagé, au croisement des humanités, des technologies et des pratiques sociales de l'information.

Ce projet propose d'explorer les formes contemporaines d'enquête numériques à travers le concept d'hyperinvestigation, défini comme l'articulation entre investigation en ligne (notamment OSINT) et ingénierie documentaire et logicielle. Il s'agit de penser l'enquête comme un processus de construction de preuves et de récits, fondé sur des documents numériques, à la croisée du journalisme, de la recherche et des humanités digitales.

Le projet s'appuie sur une double généalogie : d'un côté, la tradition documentaire et épistémologique des sciences de l'information (en partant du concept d'hyperdocumentation de Paul Otlet), et de l'autre, les media studies et les études sur le journalisme d'investigation. Il entend dépasser les discours dominants sur la data et l'IA pour réaffirmer la pertinence du document comme fondement de la production de savoirs.

Le titre du projet HyperION est une référence à l'ouvrage éponyme de Dan Simmons qui décrit en 1989 une infosphère (datasphere en anglais) qui pourrait s'apparenter à notre web actuel. L'ouvrage est lui-même une référence au poème de John Keats qui décrit la volonté des Titans de prendre leur revanche. Hyperion renvoie donc à des formes de quêtes complexes, entre utopie et poésie. Ce choix rentre en adéquation avec le concept d'hyperdocumentation dont la logique chez Paul Otlet repose également sur des logiques « titanesques » que vient rappeler l'oeuvre symboliste Prométhée de Jean Deville qui fut accrochée longtemps au Palais Mondial de Bruxelles, lieu du Mundaneum de Paul Otlet.Trois grands axes structurent le projet :

1. L'épistémologie de l'hyperinvestigation : en retraçant l'histoire des liens entre information, documentation et investigation, l'objectif est de construire un cadre conceptuel solide pour penser ces nouvelles pratiques à la lumière des humanités digitales.
2. L'étude des pratiques et méthodes : en constituant un corpus d'enquêtes, en menant des entretiens avec des journalistes et ONG (Bellingcat, Forensic Architecture...), et en observant les outils mobilisés, il s'agit de documenter l'émergence d'un journalisme hyperdocumenté, où la narration s'appuie sur une multitude de documents numériques, organisés et accessibles.
3. Le développement d'une ingénierie logicielle : dans une logique de recherche-création, le projet vise à concevoir des outils dédiés à l'hyperinvestigation (extensions du logiciel open source Cosma) permettant de représenter sous forme de graphes documentés les relations entre les acteurs et les actants en leur adjoignant les éléments factuels, les sources et les preuves.

En résonance avec les enjeux contemporains d'accès à l'information, de traçabilité des sources, de mémoire numérique et de responsabilité documentaire, HyperION entend poser les fondements théoriques, pratiques et techniques d'un nouveau champ de recherche : celui des études sur l'hyperinvestigation.